Le dernier siècle a rendu service à la poésie dans ce sens où quiconque désormais apprécie un travail le caractérise de poésie. Mais regrette-t-on que la poésie, celle des poèmes, ait disparu ? En 1997, quand j’ai terminé le récit La vie révolte, j’ignorais que je n’en écrirais plus d’autre. Certes, je ne renie aucune ligne de cet étrange objet romanesque. Qu’en dire, sinon qu’il ne s’agit pas d’un testament dédié à la révolte, qui n’a jamais cessé sa virevolte dans mon esprit et mon cœur ? Le héros n’est pas non plus mon double déguisé. Plutôt que cette fausse piste, voyons ici les premières lignes qui donneront peut-être envie d’en lire plus :
Je ne crois pas. Non, je ne crois pas, a rétorqué Sauveur Raivaud à ses juges. Pendant le procès, les mobiles de son crime n’ont donné lieu à aucun autre aveu. Telle a été sa défense. Quand les sens ont été tous épuisés, les recherches toutes abandonnées et que la raison ne trouve plus sa place dans l’ignorance ni l’innocence, la faute n’importe plus. La faute semble même n’avoir jamais existé. Et les liens du passé sont dénoués dans leur propre terme. Eux aussi, les juges, n’ont rien voulu savoir. En condamnant Sauveur Raivaud, ils l’ont doublement acquitté. Du coup, les soupçons qui pesaient sur l’ensemble de la société comme sur lui-même ont été levés. De l’évidence de son inadaptation au monde, il s’est retrouvé libre de tout engagement. Il purge sa peine pour marquer son refus de tolérer plus longtemps la comédie. D’elle parlons plutôt comme d’une souffrance qu’il n’a pas demandée et dont il se rétablira vite.
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