Maurice Coton
Métro Danube
En ces temps difficiles où les artistes sont priés de rester confinés chez eux, j'ai revu une sculpture qui, la première fois que je l'avais découverte près de la station de métro Danube, derrière les Buttes-Chaumont, m'avait tellement étonné que j'en avais écrit sur le champ un poème. Le modèle de la sculpture, plus sans doute que la sculpture elle-même, avait inspiré mon poème. La femme qui porte la gerbe semble dépasser l'esprit même de l'artiste, sans parler du motif de l'œuvre. Elle possède on ne sait quel air émancipé et déterminé qui franchit les années. Il est ainsi des œuvres qui devraient voir le nom du modèle accolé à celui de l'artiste. Certaines, plus rares encore, devraient porter le seul nom du modèle. Considérant qu'il a été dépossédé de son geste, le créateur donnerait son accord. Cette moissonneuse m'en paraît le modèle idéal. Le poème Métro Danube lui rend hommage.
MÉTRO DANUBE
Lèvres closes, l’air ailleurs,
Cheveux courts, mal fagotée,
Une gerbe sur la hanche,
Un manche de serpe en main,
Elle enjambe la lavande
Du terre-plein de la place ;
De celles, les reins solides,
Qui ne tremblent pas pour dire :
- Vous ne m’attraperez pas !

