" Une chose est certaine : ce que je ne suis pas aujourd'hui, et ce que je n'ai jamais été, c'est une célébrité ", raconte Harpo Marx au début de son autobiographie. Harpo a enchanté ma jeunesse. Dans des scénarios sans queue ni tête, son rôle d'incontrôlable perturbateur dépourvu de la moindre parole et logique, sinon pour pousser l'absurde dans ses derniers retranchements, m'a tenu lieu de véritable contrepoint et modèle à la fois. En quittant la piscine à vélo ce mardi de novembre, je ne m'attendais pas à le retrouver sur ma route quand une scène de rue insolite arrêta mon regard. Grimpés sur un mur de la rue de l'Evangile, deux agents s'apprêtaient à décoller un affichage sauvage, une banderole horizontale dotée de l'inscription
" TANT QU'IL Y A LA MISERE
IL N'Y AURA PAS DE RICHES "
à l'impeccable dialectique. La figure vibrante de Harpo, en coupable innocent, doux terrible et musicien muet, m'est alors apparue comme une évidence que tente de restituer le poème ci-après, composé en hommage à son humour à pleurer de rire et à son inconnue célébrité.
HARPO MA PAROLE
Dans leur nacelle au ciel en pot
Les deux agents municipaux
Rue de l'Evangile au repos
S'apprêtent à ôter la peau
D'un poster collé au drapeau
Hissé au mât d'un entrepôt
Mon dieu c'est mon frère Harpo
Marx hilare sous le capot
Du rire en ses beaux oripeaux
Il a pris sa harpe afin que nul ne s'écharpe au harpon et qu'enfin le rire muet s'esclaffe partout en langage des signes.