Maurice Coton
Ode au bigorneau
Une ode au bigorneau, quelle idée ! loin de celle que nous nous faisons de la poésie, toujours poussée à célébrer les cimes suprêmes de l'être. N'est-ce pas alors une ode aux petits riens ? Le bigorneau pourtant a toute sa place, décorative et gustative, dans les plateaux de fruits de mer. Ce serait même une faute d'oublier de le mettre, en nombres. Dans son expression la plus ancienne, la poésie joue ce rôle, en n'oubliant jamais de se ranger aux côtés de ces riens, et guidée par l'impérieuse envie de désirer "tout ou rien". Quant au pique indispensable pour avaler le bigorneau, il ne figure pas dans le poème. Même le bec acéré de l'oiseau marin ne parvient pas à l'extraire de sa coquille. Le poète, dans la coquille noire des mots, attend son tour d'écrire le monde, tel qu'il l'imagine sur un plateau royal.
ODE AU BIGORNEAU
Au Guilvinec
A l’instar de la sterne
L’iris du Finistère
Sur l’estran bleu du Steir
Un tel gastéropode
Dedans son phalanstère
En son austère coque
Garde tout son mystère
Contre ce haut gangster
A l’hystérique vol
